Sébastien, originaire du Haut-Rhin, nous raconte comment le fait de sortir de sa zone de confort et de donner une chance à l’inconnu lui ont permis de trouver son chemin. Très jeune le sport avait déjà une place prédominante dans sa vie, jusqu’à l’amener aux portes du professionnalisme.
“Quand tu fais du sport de haut de niveau, le handball pour moi, tu ne te poses pas trop de questions : entrainements, matchs, entrainements, déplacements, matchs… Tu aimes ça, c’est ce que tu as connu depuis le début. Presque tout tourne autour de cela, tu choisis des études qui te permettent de continuer à suivre le rythme, c’est une des raisons pour lesquelles j’ai choisi de rentrer en STAPS. Prof de sport, joueur de hand, la voie semblait presque toute tracée, le système était en place”.
Pourtant Sébastien commence à sentir que le système en place se craquele : s’imaginer continuer faire cela pendant des années encore ne semble plus en phase avec ce qu’il attend de sa vie.
« Je me suis rendu compte que devenir prof finalement, alors que c’était juste devant moi, ça n’avait pas vraiment de sens. Je souhaitais voir plus de choses, expérimenter, voir le monde. J’ai donc mis un coup d’arrêt à tout cela après avoir finalisé mon cursus universitaire.  J’ai pris une année sabbatique et suis parti en Angleterre, en Australie, je suis allé visiter l’Asie. Je suis revenu en France après une incroyable et positive expérience sans pour autant savoir quelle pourrait être la suite, me contraignant presque à revenir dans la voie de l’éducation. C’est à ce moment-là que l’opportunité d’intégrer une école de commerce s’offre à moi. Cela me permettait de sortir avec une expérience professionnelle et diplomante, les stages se passaient à l’international et me permettaient de continuer à voyager, c’était parfait.”
Ce cursus en école de commerce lui a permis de vivre à Hawaï puis aux Philippines où, en 2008 l’entreprise dans laquelle il a fait son stage de fin d’études lui propose un poste.
“A cette époque, 2008, c’était la crise des subprimes, il y avait pas mal d’incertitude sur les économies en Europe, aux US etc. Je n’étais pas parti forcément pour rester aux Philippines, mais la compagnie m’offre un poste, j’apprécie ce que je fais, je souhaitais rembourser mon prêt étudiant rapidement, ce qui se passe en Europe ne semble pas très stable… Je décide de rester.”
Cinq ans plus tard et pourtant au bout de monde, Sébastien se sent enfermé dans une routine professionnelle et ressent un manque. Le manque d’un but dans sa vie plus clair, plus attrayant. C’est à ce moment-là, qu’il décide de se lancer dans l’entreprenariat.
“Monter ma boite, c’était une manière de reprendre le contrôle de mon temps, de ma vie. De me tester aussi. J’étais rentré dans le rythme “metro-boulot-dodo”! Alors qu’il y a tellement de choses à faire autour de nous. Quitte à donner son temps, autant que ce soit pour quelque chose qui te tienne vraiment à coeur, qui soit proche de toi. C’est vrai, j’avais la chance à cette époque de ne pas avoir de prêt de maison, ne pas avoir d’enfants. J’avais un peu moins de 30 ans, je me suis dit que c’était le moment où je pouvais prendre le risque de faire ce que j’avais vraiment envie. C’est comme ça que j’ai lancé ma 1ère boite, Jeanuine, une marque de jeans custom qui te permet de créer tout ton pantalon de A à Z.
Après 4/5 ans et beaucoup d’huile de coude, Jeanuine avait du mal à vraiment décoller. Le travail au jour le jour me paraissait de moins en moins intéressant et tu commences à te poser la question si tout cela vaut encore tout le temps que tu mets dedans. Ca me plaisait beaucoup de l’avoir montée, lancée, du côté opérationnel tout était bien en place, j’étais fier du produit que l’on avait, mais avec le succès commercial qui se faisait toujours attendre, j’ai décidé de passer autre chose et j’ai laissé mes partenaires continuer l’aventure.” 
Son désamour grandissant pour sa première expérience entrepreneuriale le pousse alors à se remettre en question.
“J’ai toujours eu un hobby, qui était de réaliser des vidéos. Des vidéos de mes voyages au début, pour le plaisir, je n’avais jamais regardé cela comme un métier potentiel. Pour moi les personnes qui en faisaient leur métier étaient tous des professionnels qui avaient étudié cela depuis des années. J’avais déjà soumis l’idée à mon meilleur ami quelque temps auparavant, de pousser mon hobby à devenir mon travail. Ses doutes sur le sujet m’ont poussé à réévaluer tout cela. Sur le coup je me suis dit: “il a raison, je ne vais pas me lancer là dedans”. Ce qui m’a fait me rendre compte plus tard que même les gens qui ne souhaitent que le meilleur pour vous, peuvent parfois vous donner des conseils à ne pas suivre (rire).”
Il met son idée de côté pendant plusieurs mois, jusqu’à ce qu’un jour il tombe sur le dernier opus d’un vidéaste l’inspirant, et là c’est le déclic :
“Quand j’ai vu ce que cette personne était capable de faire, qu’il était capable d’en vivre, je me suis dit que moi aussi je pouvais le faire, que si j’investissais autant de temps et d’énergie que j’avais fait dans mes précédentes expériences (sport de haut niveau, première entreprise…), il n’y avait pas de raison que cela ne marche pas. J’ai alors décidé d’investir mes économies dans le matériel nécessaire pour passer au palier supérieur, et j’ai regardé des heures de vidéos sur internet pour apprendre et me former. Beaucoup de choses sont disponibles gratuitement aujourd’hui avec internet. Un de mes motto est : “Si je peux l’apprendre, je peux le faire”. Je me suis lancé seul dans un premier temps, et finalement, quand tu commences à faire ce qui te plait vraiment, il y a des énergies, des choses que tu ne contrôles pas vraiment qui se mettent en place, des portes qui s’ouvrent. En shootant l’un de mes premiers contrats, pour couvrir un événement, je rencontre la personne qui partage ma vie aujourd’hui. Notre passion commune pour la vidéo nous amène rapidement à passer à l’étape supérieure en montant notre propre boite de production : Maldavar Films “.
En décembre 2016, il abandonne officiellement Jeanuine et se lance dans cette nouvelle aventure :
“La première année d’activité c’est bien passé, un projet en ramène d’autres, nos premiers clients apprécient notre travail, les choses se mettent en place ! Certainement que j’ai eu un peu de chance quand j’y pense, mais la chance finalement qu’est ce que c’est ? Je la résume souvent à “opportunité” + “timing”.  Il faut être prêt quand les opportunités se présentent, avoir les connaissances nécessaires en apprenant de nouvelles choses aussi souvent que possible, s’entrainer, prendre le temps et maitriser son sujet. Et après arrive le timing, quand l’opportunité passe devant toi, tu t’es préparé maintenant il faut saisir le moment et ne pas laisser place à la peur. Ce timing, tu ne le maitrise pas vraiment, regarde la rencontre avec ma copine par exemple. Quand j’ai dit que j’ai peut être perdu plusieurs mois avec mon ami qui m’avait conseillé de repenser à tout cela, peut être que si je m’étais lancé à ce moment là, je n’aurais sans doute pas rencontré ma future partner !  Avec la chance finalement, ce qui est vraiment important, c’est  d’être capable de la saisir quand elle te passe devant le nez.”
Cet interview permet à Sébastien de repenser à son parcours.
“A 20 ans, je pense que la très grande majorité des personnes n’ont absolument aucune idée de ce qu’elles souhaitent vraiment faire dans la vie. On rentre facilement dans un système, un certain conformisme, on suit le rythme de nos voisins, de nos parents etc. On cherche une certaine sécurité, pour moi à l’époque de mes études, devenir fonctionnaire c’était une manière d’avoir cette sécurité qui devait m’apporter le bonheur que tout le monde recherche. L’entreprenariat, je n’y avais même jamais pensé avant de voyager, c’est vraiment une expérience qui m’a permis d’ouvrir les yeux. J’aurais pu continuer à faire du hand, devenir prof de sport… mais j’ai compris que ça n’allait pas me rendre heureux, j’ai donc décidé de prendre ce risque de tout arrêter. Car au final, rentrer dans cette routine, je trouvais cela encore plus risqué pour ma santé mentale (rire) ! En être conscient c’est la 1ère étape. Steve Jobs disait: ” à partir du moment où tu te réveilles 3 jours de suite en te disant: “je n’ai pas envie de faire ça aujourd’hui”, c’est qu’il faut changer quelque chose.”  Il est pas totalement idiot le Jobs.
Tu commences alors à te poser des questions, les bonnes questions : qu’est ce que j’aime vraiment par exemple ? Des fois tu ne sais pas toujours et puis petit à petit, avec des expériences que tu tentes, les opportunités que tu saisis, tout ça t’aide à répondre à ces questions… Personnellement, l’année de césure m’a été bénéfique, ça m’a permis de faire grandir ce que j’appelle “mon arbre des possibles”. Le tronc c’est toi, ta vie, ton socle, et plus tu avances, plus tu montes dans les branches et plus tu te rends compte qu’il y a pleins de branches différentes, des branches dont tu ne savais rien, même pas qu’elles existaient! Ces nouvelles branches, tu les découvres grâce aux rencontres, aux expériences que tu vis. Souvent tu ne sais pas que quelque chose va te plaire tant que tu ne l’as pas essayé, c’est en se lançant dans l’inconnu que l’arbre des possibles fait pousser ses branches.
Bien sur tout n’est pas toujours facile, tu prends des risques, des fois tu gagnes des fois tu perds, mais se lever le matin et savoir que ce que tu vas faire aujourd’hui te fait vraiment plaisir, ça n’a pas de prix. “
Sébastien se garde pourtant bien de s’enfermer dans une routine et nous montre un dessin qu’il a reproduit sur son mur :
“On a tous une zone de confort. L’endroit où on vit depuis des années, les amis qui sont la porte d’à coté, le boulot que l’on connait par coeur, le bon salaire qui rentre tous les mois… Et pourtant pour certaines personnes, il manque toujours quelque chose, un souhait secret, une envie qui fait peur car elle peut sembler impossible à atteindre. C’est en sortant de cette zone de confort justement que l’on peut laisser la magie faire son travail. Laisser la place à l’inconnu, laisser de coté pendant un moment notre désir de toujours tout contrôler. Tu commences alors à faire de nouvelles rencontres, voir de nouvelles opportunités, l’arbre grandit, de nouvelles branches poussent.
Cela fait partie de ma recette du bonheur : laisser partir certaines choses, faire de la place pour de nouvelles, comme un bon coup de ménage.
 
Cet état d’esprit peut être appliqué tous les jours sur des petites choses. Par exemple toutes les semaines quand je vais faire mes courses j’essaie toujours d’essayer un nouveau produit que je ne connais pas. Ca à l’air bête comme cela mais combien d’entre nous sont dans cette routine où même les courses on pourrait les faire les yeux fermés, plutôt que de se sentir un peu aventureux et d’essayer quelque chose de nouveau.
 
Ensuite j’essaie d’appliquer cet état d’esprit à des choses plus importantes, qui potentiellement peuvent changer une vie quand on sent que c’est nécessaire. A grande échelle, j’ai suivi ce principe trois fois pour le moment : l’arrêt du sport de haut niveau pour partir voir le monde. Passer du statut de salarié à celui d’entrepreneur. Et 4 ans plus tard une nouvelle fois, en décidant d’organiser ma vie autour de ma passion. Est-ce que ces choix me faisaient peur ? Certainement, je sautais dans l’inconnu à chaque fois, mais ce n’était pas une peur bloquante, il y avait de l’excitation dans cette peur. Finalement, le changement, c’est ce qui nous rend vivant.”

My richness is life, Maldavar Films